Newsletter #14 Le point sur l'actualité sociale
LAW IN PROGRESS
Parution d’un décret sur la liste des pathologies ouvrant droit à un congé pour les parents de l’enfant atteint
Le salarié dont l’enfant est diagnostiqué comme souffrant d’un handicap bénéficie d’un congé payé d’au moins deux jours, étant précisé que la convention collective peut prévoir un congé plus long.
La loi n° 2021-1678 du 17 décembre 2021 prévoit deux nouveaux cas dans lesquels le salarié peut bénéficier du congé payé de deux jours :
- L’annonce de la survenue d'une pathologie chronique nécessitant un apprentissage thérapeutique chez un enfant ;
- L’annonce d'un cancer chez un enfant.
Ces deux cas sont prévus aux articles L.3142-1 et L.3142-4 du Code du travail.
Un décret du 27 mars 2023, dont les dispositions sont reprises à l’article D.3142-1-2 du Code du travail, précise la liste des pathologies chroniques ouvrant droit à congé, à savoir :
- Les maladies chroniques prises en charge au titre des articles D.160-4 et R.160-12 du code de la sécurité sociale (telles que l’insuffisance cardiaque, la paraplégie ou la mucoviscidose...) ;
- Les maladies rares répertoriées dans la nomenclature des maladies rares (nomenclature Orphanet dont la liste est disponible sur https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/index.php) ;
- Les allergies sévères donnant lieu à la prescription d'un traitement par voie injectable.
Pour rappel, le congé payé ne doit pas nécessairement être pris immédiatement après l'annonce, mais peut l’être dans un délai raisonnable par rapport à celle-ci.
Paie : les barèmes kilométriques sont revalorisés
Un arrêté du 27 mars 2023 revalorise les barèmes kilométriques applicables en cas de versement d’indemnités forfaitaires kilométriques.
Ces indemnités, qui peuvent être versées par l’employeur, permettent d’indemniser le salarié qui est contraint d’utiliser son véhicule personnel entre son domicile et son lieu de travail.
Ainsi, lorsqu’elles sont versées dans les limites fixées par les barèmes kilométriques annuellement publiés par l’administration fiscale, ces indemnités sont réputées utilisées conformément à leur objet, et peuvent être exonérées de cotisations sociales.
En cas d’utilisation d’un véhicule électrique, le montant des indemnités kilométriques peut être majoré de 20%
Cette majoration concerne les véhicules disposant exclusivement d'une motorisation électrique (et pas ceux combinant électrique et autre mode de carburation).
Barème kilométrique autos 2023 |
|||
Puissance administrative |
Jusqu’à 5 000 km |
De 5 001 km à 20 000 km |
Au-delà de 20 000 km |
3 CV et moins |
d × 0,529 |
(d × 0,316) + 1 065 |
d × 0,370 |
4 CV |
d × 0,606 |
(d × 0,340) + 1 330 |
d × 0,407 |
5 CV |
d × 0,636 |
(d × 0,357) + 1 395 |
d × 0,427 |
6 CV |
d × 0,665 |
(d × 0,374) + 1 457 |
d × 0,447 |
7 CV et plus |
d × 0,697 |
(d × 0,394) + 1 515 |
d × 0,470 |
d représente la distance parcourue en kilomètres |
LES BONNES PRATIQUES DU DRH
Jours fériés : comment rémunérer ses salariés ?
Il convient de différencier le 1er mai des autres jours fériés.
En effet, pour le 1er mai, les règles légales applicables sont les suivantes :
- Si le 1er mai est chômé : le salarié doit percevoir sa rémunération habituelle, quelle que soit son ancienneté ;
- Si le 1er mai est travaillé : la journée de travail du salarié doit lui être payée double (soit la rémunération correspondant au temps de travail accompli, à laquelle s’ajoute une indemnité égale au montant de cette rémunération).
Pour les autres jours fériés, les règles légales applicables sont les suivantes :
- Si le jour férié est chômé : le salarié doit percevoir sa rémunération habituelle, s’il bénéficie d’une ancienneté au moins égale à 3 mois au sein de l’entreprise ;
- Si le jour férié est travaillé : aucune majoration de salaire n’est prévue par le Code du travail.
Certaines conventions collectives peuvent néanmoins prévoir des dispositions plus favorables.
Rachat de jours de repos et de jours de RTT : le report d’un reliquat de la réduction de cotisations est possible
Pour rappel, la loi de finance rectificative pour 2022 prévoit la possibilité pour les salariés de monétiser les jours de repos ou de réduction de temps de travail (RTT) acquis du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025 (cf. Newsletter #4, Le questions-réponses « rachat de jours de repos » est publié par le Ministère du Travail), en application soit :
- D’un accord de réduction du temps de travail antérieur à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, et maintenu ;
- D’un accord d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine.
Ces heures – qui ne sont pas imputées sur le contingent annuel des heures supplémentaires – font l’objet d’une majoration de salaire et sont éligibles aux dispositifs de réduction de cotisations salariales et d’exonération d’impôt sur le revenu dans la limite de 7 500€ par an et de déduction forfaitaire de cotisations patronales.
Dans une mise à jour du 17 mars 2023, la fiche DSN n° 2604 apporte des précisions supplémentaires sur les conditions d’application de la réduction de cotisations salariales sur les heures supplémentaires.
Dans certaines situations, le montant de cotisations salariales dues ne serait pas suffisant pour imputer la totalité de la réduction prévue à l’article L. 241-17 du CSS.
La réduction prend en compte un taux dans la limite de 11,31 %, le montant obtenu ne peut pas dépasser le montant des cotisations salariales d’assurance vieillesse de base dues pour le mois.
Ainsi, lorsque l’employeur rachète un nombre de jours de RTT conséquent et que le salarié effectue en plus des heures supplémentaires structurelles et/ou des heures supplémentaires aléatoires, le montant de la réduction peut être supérieur au montant des cotisations salariales d’assurance vieillesse de base dues sur le mois.
Le report de l’éventuel reliquat de la réduction est autorisé sur le mois suivant celui du rachat des JRTT.
Ainsi, à l’instar des heures supplémentaires décomptées sur une période différente du mois civil, si la réduction est supérieure au montant des cotisations effectivement dues, le reliquat d’exonération peut être reporté sur le mois suivant dans la limite des cotisations salariales éligibles.
LE SAVIEZ-VOUS ?
EN CHIFFRES : 11,4 %
C’est le taux de démission de CDI en 2022 (+1,8 points par rapport à 2019 soit avant la crise sanitaire).
L’hébergement-restauration est le secteur au sein duquel le taux de démissions est le plus élevé 31,2 % en 2022.
L’industrie demeure le secteur dans lequel les démissions sont les moins fréquentes (6,2 % en 2022), mais l’augmentation relative du taux de démissions dans ce secteur entre 2019 et 2022 est la plus forte sur la période (+ 31 %).
PANORAMA JURISPRUDENTIEL
Inaptitude et obligation de reclassement
L’employeur a-t-il l’obligation de rechercher à reclasser un salarié inapte sur un emploi en télétravail si cela est préconisé par le médecin du travail ?
OUI
Pour rappel, un employeur dont l’un des salariés est déclaré inapte doit chercher à le reclasser sauf si le médecin du travail l’a dispensé de cette obligation.
En dehors des cas de dispense, le médecin du travail doit indiquer dans l’avis d’inaptitude ses préconisations pour le reclassement du salarié.
En l’espèce, une salariée avait été déclarée inapte à son poste de secrétaire médicale coordinatrice. Le médecin du travail avait indiqué sur l’avis d’inaptitude que la salariée « pourrait occuper un poste administratif sans déplacement et à temps partiel (2 jours par semaine) en télétravail avec aménagement du poste approprié ».
Dans la mesure où il n’existait aucun poste en télétravail au sein du cabinet médical, l’employeur a licencié la salariée pour impossibilité de reclassement à la suite d’une inaptitude.
La salariée a saisi le conseil des prud’hommes et sollicitait des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse car elle considérait que l’employeur n’avait pas rempli son obligation de reclassement.
L’employeur faisait valoir le fait qu’il n’était pas tenu de créer un poste adapté aux préconisations médicales et que, dans la mesure où il n’y avait pas de télétravail au sein de la société, il n’avait donc pas l’obligation de créer un poste en télétravail pour la salariée.
Il indiquait également que le télétravail n’était pas compatible avec l’obligation du respect du secret médical à laquelle la salariée était tenue.
La Cour de cassation a cependant considéré que le fait que le télétravail ne soit pas mis en place dans l’entreprise n’empêchait pas l’employeur de proposer un tel aménagement de travail à la salariée dans la mesure où le télétravail peut être prévu par un simple avenant au contrat de travail.
En outre, la Cour de cassation a estimé que du fait de sa fonction de « coordinatrice », la salariée n’avait pas accès aux dossiers médicaux et pouvait donc parfaitement exercer ses missions à son domicile.
Par conséquent, la Cour de cassation a considéré que l'employeur n’avait pas respecté son obligation de reclassement, rendant de ce fait le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse.
Cass. Soc., 29 mars 2023, n°21-15.472
Protection des données personnelles et droit de la preuve
Le juge peut-il ordonner la communication de bulletin de paie pour permettre à une salariée de prouver l’inégalité de traitement ?
OUI
En l’espèce, une salariée considérait avoir fait l’objet d’une inégalité de rémunération avec des collègues masculins occupant des postes identiques au sien.
Elle avait donc saisi le juge des référés afin d’obtenir les bulletins de paie de ces derniers et prouver cette inégalité de traitement.
L’employeur estimait que la communication de ces éléments était contraire aux dispositions du règlement général sur la protection des données (RGPD) d’autant plus que ces derniers n’étaient pas nécessaires à la défense de la salariée, laquelle disposait d’autres éléments permettant de présumer l’existence d’une discrimination.
La Cour de cassation a rappelé que le droit à la protection des données personnelles doit respecter le principe de proportionnalité et estime qu’en l’espèce, la communication de ces bulletins étaient nécessaires à l’exercice du droit de la preuve et proportionné au but poursuivi, à savoir la défense de la salariée.
Aussi, la Cour de cassation a considéré que la communication des bulletins de paie était fondée.
Cass. Soc. 8 mars 2023, n°21-12.492
Recevabilité d’un moyen de preuve illicite et droit à la preuve de l’employeur
Un moyen de preuve illicite, issu d’un système de géolocalisation, peut-il être recevable en justice ?
OUI
Dans deux arrêts non publiés, la Cour de cassation a rappelé les principes qu’elle avait précédemment dégagés pour d’autres moyens de contrôle des salariés : une preuve illicite peut être recevable si elle est indispensable à l’exercice du droit à la preuve (Newsletter #12, Preuve illicite obtenue par vidéosurveillance : pour être admise en justice, elle doit être indispensable au droit de la preuve).
En effet, « l’illicéité d’un moyen de preuve […] n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ».
Or, dans le second arrêt, le droit à la preuve n’avait pas été invoqué par l’employeur, ce qui ne permettait pas aux juges de vérifier si la preuve litigieuse était indispensable à l’exercice du droit de la preuve avant de la rejeter des débats.