Newsletter #26 Le point sur l'actualité sociale
A LA UNE
Alerte cyclonique : quelles sont les dispositions applicables en matière de droit du travail ?
La gestion des absences
Lors d’une alerte cyclonique, le salarié n’a pas la possibilité de se rendre sur son lieu de travail. Comment cette absence peut-elle être gérée par la société ?
En principe, l’employeur n’a pas l’obligation légale de rémunérer les temps d’absences des salariés résultant de leur impossibilité à se rendre sur leur lieu de travail en raison des intempéries et notamment en cas d’alerte cyclonique.
Cependant, des dispositions conventionnelles, contractuelles ou un usage en vigueur dans l’entreprise peut prévoir des règles plus favorables pour les salariés, à savoir le maintien de leur rémunération durant leur absence pour cette raison.
Dans l’hypothèse où aucune rémunération n’est due aux salariés, l’employeur peut leur proposer, afin d’éviter toute perte de salaire, de prendre des congés payés ou, s’ils en bénéficient, des jours de RTT.
Enfin, lorsque les fonctions du salarié le permettent, l’idéal est de privilégier le télétravail. Cette solution permet au salarié d’assurer ses fonctions sans perte de rémunération.
Le recours à l’activité partielle
L’employeur dont l’activité est affectée par le passage d’un cyclone peut placer ses salariés en activité partielle pour le motif « sinistre ou intempéries de caractère exceptionnel » visé au 3° de l’article R. 5122-1 du code du travail.
Selon l’article R. 5122-3 du code du travail, l’employeur dispose d’un délai de trente jours à compter du placement des salariés en situation d’activité partielle pour adresser la demande d’autorisation préalable au préfet du département où est implanté l'établissement concerné.
La demande précise les motifs justifiant le recours à l'activité partielle, la période prévisible de sous-activité et le nombre de salariés concernés.
Le taux horaire de l'allocation d'activité partielle versée à l'employeur, pour chaque salarié placé en activité partielle, est égal à 36 % de la rémunération horaire de référence, dans la limite de 4,5 fois le Smic horaire brut.
La Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2024 a été publiée au Journal Officiel !
Les mesures relatives aux cotisations :
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Au titre de l’année 2024, la valeur servant de référence pour déterminer l’éligibilité à la réduction des taux d’allocations familiales et d’assurance maladie est gelée au 31 décembre 2023, et le coefficient multiplicateur ajusté comme suit :
Pour les cotisations patronales Allocations Familiales : 3,4609 fois le SMIC applicable au 1 janvier 2024 (3,5 fois le SMIC applicable au 31 décembre 2023) ;
Pour les cotisations patronales Allocations Maladie : 2,4721 fois le SMIC applicable au 1 janvier 2024 (2,5 fois le SMIC applicable au 31 décembre 2023).
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Les textes relatifs à l’indemnité de rupture conventionnelle individuelle ont été clarifiés concernant l’exonération de cotisations de sécurité sociale et de charges ayant la même assiette ;
La procédure d’abus de droit en matière de contrôle URSSAF a été simplifiée ;
L’assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants sera réformée à compter de janvier 2025 dans un souci de simplification et d’équité en comparaison avec les salariés ;
Le projet de transfert à l’URSSAF (ou CGSS) du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire AGIRC-ARRCO et APEC a été abandonné.
Les mesures relatives aux prestations sociales :
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Le délai de carence de 3 jours applicable au versement des indemnités journalières versées par l'assurance maladie est supprimé pour les arrêts liés à une interruption spontanée de grossesse compter du 1er janvier 2024, et pour les arrêts liés à une interruption médicale de grossesse à compter du 1er juillet 2024 ;
Le saviez-vous ? Le site net-entreprises.fr a communiqué sur les modalités de déclaration en DSN des arrêts de travail consécutifs à une fausse-couche. L’arrêt de travail devra être déclaré en DSN comme un arrêt de travail classique. Le formulaire spécifique CERFA permettra à l’Assurance Maladie de neutraliser le délai de carence.
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L’accès à la complémentaire santé solidaire est simplifié pour les bénéficiaires de certains minima sociaux afin de réduire le renoncement aux soins ;
La création d’un droit renouvelable à l’allocation journalière de proche aidant.
Les mesures pour lutte contre la fraude sociale :
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Les arrêts maladie prescrits lors d’une téléconsultation sont limités à une durée de trois jours, sauf exceptions (telles que la délivrance par le médecin traitant) ;
Les obligations des plateformes numériques seront renforcées pour garantir le paiement des cotisations des travailleurs de ces plateformes ;
Les peines encourues pour le délit d’organisation de la fraude sociale ont été renforcées et le délit d’incitation publique à la fraude sociale ainsi que le délit de facilitation de la fraude sociale ont été créés ;
Les mesures concernant les groupements d’employeurs :
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Les salariés mis à disposition par un groupement d’employeurs ne seront plus inclus dans l’effectif « sécurité sociale » du groupement, excepté pour les règles relatives à la tarification des accidents du travail et maladies professionnelles. Cette réforme entrera en vigueur à une date qui sera définie par décret et au plus tard le 1er janvier 2026.
Loi n° 2023-1250, 26 déc. 2023, JO 27 déc.
Montant net social
Depuis le 1er janvier 2024, les employeurs ont l’obligation de déclarer le montant net social via la déclaration sociale nominative (DSN), selon les modalités décrites dans notre newsletter n°10.
Pour rappel, le montant net social correspond à la différence entre les revenus bruts liés au travail, déduction faite des garanties collectives de prévoyance et de retraite supplémentaire financées par l'employeur, et le total des cotisations et contributions sociales à la charge du salarié.
En outre, depuis le 1er janvier 2024, le montant net social est une mention obligatoire du bulletin de paye (article R. 3243-1 du code du travail).
LE SAVIEZ-VOUS ?
Proposition d’un CDI à l’issu d’un CDD ou d’un contrat d’intérim : quelles sont les nouvelles obligations de l’employeur ?
Depuis le 1er janvier 2024, l’employeur qui propose à un salarié en CDD ou en contrat d’intérim, la poursuite de leurs relations contractuelles en CDI, a de nouvelles obligations dont vous trouverez ci-après le détail.
EN CHIFFRES
+5,4 %
Pourcentage de revalorisation du Plafond de la Sécurité Sociale. Depuis le 1er janvier 2024, celui-ci s’élève à 3 864€ (contre 3 666€ en 2023) par mois et à 46 368€ par an (contre 43 992€ en 2023)
Cette revalorisation a également une incidence sur le montant minimum de la gratifications versées aux stagiaires qui sont en stage pour une durée de plus de deux mois. Ainsi, sauf accord plus favorable, cette gratification est fixée à 4,35€ par heure (au lieu de 4,05€).
Arrêté du 19 décembre 2023 portant fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2024
+0,12 point
Augmentation du taux de la cotisation patronale vieillesse déplafonnée depuis le 1er janvier 2024
Le taux de la cotisation patronale vieillesse déplafonnée, qui passe de 1,90% à 2,02%, est l’une des mesures qui avait été annoncée dans le cadre de la réforme des retraites. Cette hausse est compensée à due concurrence par une baisse du taux moyen de cotisation AT-MP (de 2,24 % en 2023 à 2,12 % en 2024).
Le taux de la cotisation patronale vieillesse plafonnée reste quant à lui inchangé.
+1,13 %
Depuis le 1er janvier 2024, le montant du SMIC s’élève à 11,65€ brut (contre 11,52€ depuis le 1er mai 2023), soit 1 766.92€ brut par mois, et fait ainsi l’objet d’une revalorisation de 1,13%.
Décret n° 2023-1216 du 20 décembre 2023 portant relèvement du salaire minimum de croissance
6000 euros
Il s’agit du montant de l’aide financière à l’emploi des apprentis, versée par l’ASP, en complément de la prise en charge financière des contrats d’apprentissage par les OPCO. Cette aide a été prolongée pour les contrats d’apprentissage conclus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2024.
PANORAMA JURISPRUDENTIEL
Salarié protégé : si l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire, l'administration doit refuser l'autorisation de licencier
L’Inspecteur du travail peut-il autoriser le licenciement d’un salarié protégé qui se fonde sur des agissements fautifs qui étaient déjà connus de l’employeur à la date à laquelle il a prononcé une précédente sanction disciplinaire ?
NON. L'administration ne peut autoriser le licenciement d'un salarié protégé qui se fonde sur des agissements fautifs du salarié qui étaient déjà connus de l'employeur à la date à laquelle il a prononcé une précédente sanction disciplinaire.
En l’espèce, le 18 décembre 2017, une mise à pied à disciplinaire est prononcée à l’encontre d’un salarié protégé. Quelques mois plus tard, l’employeur demande à l’inspecteur du travail l’autorisation de licencier ce salarié pour faute, pour des faits sur lesquels ne reposait pas la précédente sanction mais dont l’employeur en avait connaissance.
L’inspecteur du travail refuse le licenciement du salarié protégé. L’employeur saisit alors le ministère du travail en formant un recours hiérarchique, qui autorise le licenciement du salarié.
Le salarié conteste alors la décision du ministère devant la juridiction administrative et obtient gain de cause.
La juridiction rappelle tout d’abord la prescription des faits fautifs, qui interdit l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance.
En effet, « l'employeur qui, ayant connaissance, dans une même période de temps, de divers faits commis par un salarié, non atteints par la prescription résultant de l'article L. 1332-4 du code du travail et considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner qu'une partie, ne peut légalement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire en vue de sanctionner les autres faits dont il avait connaissance à la date de l'infliction de la première sanction ».
Il en conclut que « l'administration, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé pour un motif disciplinaire, ne peut légalement autoriser ce licenciement en ce qu'il se fonde sur des agissements fautifs du salarié qui étaient déjà connus de l'employeur à la date à laquelle il a prononcé une précédente sanction disciplinaire ».
Or, dans cette affaire, le projet de licenciement du salarié protégé reposait sur plusieurs faits intervenus entre les mois de septembre 2017 et janvier 2018 et certains d'entre eux étaient déjà connus par la société lorsque, le 18 décembre 2017, elle a sanctionné le salarié d'une mise à pied d'une durée de 3 jours.
L'autorisation de licenciement doit alors être refusée.
Est-ce que le refus de l’employeur de procéder à une contre-expertise à un contrôle d’alcoolémie prive de cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié en état d’ébriété ?
NON. En l’espèce, un conducteur de bus de la RATP a fait l’objet d’un contrôle d’alcoolémie indiquant que son taux d’alcool par litre de sang était de 0.28 grammes.
Ce contrôle a été réalisé en application du règlement intérieur de la société, lequel prévoyant que « les salariés conduisant un véhicule, une machine dangereuse, manipulant des produits ou des outils dangereux, ou exerçant en tout état de cause un métier ou une fonction de sécurité, dont la liste est fixée en annexe du règlement intérieur, pourront faire l'objet d'un contrôle d'alcoolémie pour vérifier la présomption d'imprégnation alcoolique ou d'un test de dépistage de stupéfiants ».
Le règlement précisait que les modalités de ces contrôles devront respecter le principe de confidentialité et que le salarié pourra demander une contre-expertise.
Le salarié a sollicité une contre-expertise lors de son entretien préalable, lequel s’est déroulé 12 jours après le contrôle, ce que l’employeur a refusé.
Le salarié, licencié en raison du contrôle d’alcoolémie, a contesté son licenciement du fait du refus de l’employeur de procéder à une contre-expertise, telle que prévue dans le règlement intérieur.
La Cour de cassation n’a pas donné droit au salarié en considérant que l’objet de la contre-expertise prévue par le règlement intérieur était que le salarié puisse contester les résultats du contrôle d’alcoolémie, ce qui nécessitait que la contre-expertise soit réalisée dans un court délai. Or, cela ne pouvait pas être le cas dès lors que la demande de contre-expertise du salarié a été réalisée 12 jours après le contrôle.
Cass. soc., 6 déc. 2023, n° 22-13.460
L’employeur peut-il licencier pour faute grave un salarié parti en vacances, sans avoir posé ses jours de congés au préalable, si ce dernier n’a pas respecté pas la législation afférente aux dates de congés ?
NON. Un salarié a été licencié pour faute grave au motif qu’il s’était absenté tout le mois d’août sans avoir obtenu l’accord de son employeur et sans avoir justifié son absence malgré les deux relances de ce dernier. Il a saisi le conseil de prud’hommes aux fins de contestation de son licenciement pour faute grave.
Le salarié justifiait son absence notamment au motif que l’employeur n’avait pas respecté la législation afférente aux dates de congés payés (sur le délai d’information de la période de prise de congés et sur le délai de communication de l’ordre de départ en congés à chaque salarié).
Les juges du fond ont requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse.
La Chambre sociale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi au motif que le salarié ne pouvait valablement s’absenter sur une période aussi longue, sans prévenir son employeur et sans avoir posé ses congés au préalable. La circonstance que l’employeur n’ait pas respecté la législation afférente aux dates de congés ne légitimait pas cette absence injustifiée.
Toutefois, cette faute ne rend pas impossible la poursuite du contrat de travail et constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, dans la mesure où le salarié aurait pu être autorisé par son employeur à prendre ses congés s’il avait formulé sa demande auprès de ce dernier et s’il n’avait pas épuisé tous ses jours de congés.
Par conséquent, même si l’entreprise ne respecte pas les règles concernant l'organisation des congés payés, le salarié ne peut pas quitter son poste sans avertir au préalable son employeur sans commettre de faute.